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Randy McLane, Vicky Gordon, Cal et Dee Latener.

Comme vous avez pu le lire dans l’en-tête, cette review traite d’un manga apparenté au “Yaoi”. Etant donnée la relative pauvreté du genre en France, je pense qu’une petite explication est nécessaire… Grossièrement, le yaoi englobe tous les mangas traitant explicitement de relations amoureuses entre hommes (son penchant féminin se nommant “yuri”). Plutôt timide dans les années ‘80, le genre va connaître une véritable explosion dans les années ‘90, tout du moins au Japon : le lectorat féminin (principale cible du yaoi) se passionne pour cette représentation différente de l’amour, proposant une alternative intéressante aux shôjo.
La fraîcheur de l’originalité n’a pas duré très longtemps, le genre ayant désormais acquis ses propres codes et stéréotypes. Par conséquent, on peut observer une certaine uniformisation, un peu regrettable, des mangas yaoi, heureusement contrebalancée par quelques oeuvres atypiques. FAKE en fait partie, et c’est sûrement ce qui explique d’une part son grand succès auprès du public japonais, et d’autre part qu’il ait été le premier yaoi à avoir été exporté à l’étranger.

NYPD 27 // Randy Mc Lane // Dee Latener

Randy McLane (Ryo pour les intimes), jeune officier de police, vient d’intégrer le 27e commissariat de New York. Il se voit affecter comme partenaire un certain Dee Latener, dont les manières directes et vindicatives vont immédiatement troubler Ryo, par nature beaucoup plus calme et posé. Son exubérant collègue se montrant toutefois très sympathique, les deux flics vont travailler ensemble dans une entente tout ce qu’il y a de plus normale pour deux collègues. Jusqu’à une certaine affaire…

Un dealer des quartiers pauvres de New York vient d’être abattu, manifestement sur la demande du parrain de la drogue qui l’employait, laissant derrière lui un gosse de douze ans orphelin, Vicky. Ce dernier échoue au 27e commissariat, où il se confiera a Ryo et va se prendre d’affection pour lui. Le policier au coeur gros comme ça décide d’accueillir l’enfant chez lui, au moins jusqu’à ce que l’enquête se termine.

L’affaire prend une tournure plus dramatique lorsque Vicky et Dee se font enlever sous les yeux de Ryo par la racaille locale, assez énervée par le fait que la drogue confiée au père de Vicky se soit volatilisée. Bien évidemment, Ryo, n’écoutant que son courage, va voler au secours de son petit protégé. Et, accessoirement, touché par l’attention de son collègue, Dee va le remercier en lui offrant un délicieux french kiss, ce qui va achever de semer la confusion du pauvre Ryo, qui n’est pas spécialement attiré par les hommes (enfin, c’est ce qu’il prétend). Cette relation quelque peu chaotique va donc s’épanouir lentement, à mesure que Ryo acceptera ses sentiments.

Un commissariat à peine déjanté

L’intrigue se serait certainement enlisée dans une mièvrerie écoeurante en l’espace de quelques chapitres si le casting proposé par FAKE ne s’était pas révélé aussi agréable. Chacun apporte en effet sa petite dose de vie et (surtout) d’humour.

Randy McLane (dit Ryo) : on peut dire de ce métis japonais/américain qu’il se rapproche furieusement de la conception de “l’homme idéal” véhiculée par les shôjo : Ryo est en effet beau, gentil, doux et prévenant. Il sait s’occuper des enfants et fait même le ménage (rendez-vous compte). C’est également un grand candide, et on comprend facilement pourquoi Dee prend un tel plaisir à le taquiner. Sa naïveté en énervera sûrement quelques-uns, mais elle fait également partie de son charme. Devenu orphelin à l’âge de dix-huit ans, dans des conditions assez particulières, Ryo porte toujours en lui un peu de mélancolie et de regrets, pleinement révélés au lecteur lorsqu’il se retrouvera confronté à son passé.

Randy McLane et Dee Latener.

Dee Latener : on a du mal à imaginer une personnalité aussi opposée à celle de Ryo. Dee est en effet un personnage plutôt sans gêne et fainéant, sa principale occupation étant de taquiner son cher collègue. Mais cette attitude désinvolte cache en fait un amour réellement sincère, chose que Ryo mettra un certain temps à assimiler (il n’est pas très rapide). Même s’il se montre parfois un peu agressif, Dee est en réalité quelqu’un de très doux (enfin, en particulier avec Ryo, le reste de l’humanité devant se coltiner sa mauvaise humeur). Il a été élevé dans un orphelinat religieux du Bronx, sous l’oeil attentionné d’une Mère supérieure pour laquelle il éprouve toujours un profond respect.

Une scène délirante entre Randy McLane et Dee Latener.

Vicky Gordon : jeune métis afro-américain, élevé dans le Bronx, Vicky sera adopté par Ryo après que son père se soit fait assassiner. Vicky ne voit pas d’un très bon oeil les multiples tentatives de séduction de Dee, et met un point d’honneur à protéger la chasteté de son “papa” adoptif.

Cal : tout comme Vicky, Cal est une enfant du Bronx, fille d’un criminel actuellement en prison. Très proche de Vicky, elle éprouve également beaucoup d’affection pour Ryo, qu’elle considère comme un grand frère. Plus lucide que Vicky, elle considère dés le début Dee et Ryo comme un couple.

Vicky et Cal à la rescousse.

Jeremy J. Adams (dit JJ) : l’idylle naissante entre les deux héros aurait été trop simple si un élément perturbateur n’était pas venu s’immiscer dans leur relation. JJ est en effet complètement dingue de Dee, et l’exprime d’une manière pour le moins violente (à savoir se jeter éperdument dans les bras de l’être aimé en hurlant “DEE SEMPAI !!!”). Si JJ est habituellement montré comme l’élément drôle et mignon de la série (ce n’est pas vraiment l’avis de Dee…), quelques passages s’attachent tout de même à montrer son côté sérieux et sensible. Conscient qu’il ne peut rivaliser avec Ryo, il cessera peu à peu de s’interposer entre le japonais et son sempaï adoré.

Jeremy J. Adams.

Barclay Rose : je n’aurais jamais imaginé qu’il y avait autant de gays dans la police. Oui, Barclay, le supérieur de Dee et Ryo, aime lui aussi les hommes. Il a particulièrement le béguin pour l’inspecteur McLane, ce que Dee ne vit pas d’un très bon oeil (à vrai dire, ils se détestent cordialement).

Diana Spacey : cette agent du FBI, grande amie de Barclay, est à peu près la seule figure féminine notable du manga (je vous rappelle qu’il est ici question d’un yaoi ^^°). Sa présence est néanmoins indispensable, puisqu’elle ajoute une touche de folie très appréciable : son attitude exubérante et le fait qu’elle s’amuse à mettre son grain de sel dans notre petit couple vedette la rend vraiment attachante. Vers la fin du manga, elle sera également celle qui aidera Ryo à prendre conscience de ses sentiments et à cesser de se mentir à lui même.

Une scène... diabolique.

Juste ce qu’il faut de bons sentiments ?

Si la partie prédominante de FAKE concerne bien évidemment les sentiments qu’éprouvent Ryo et Dee l’un pour l’autre, il ne faut pas oublier que ces deux-là sont policiers. Par conséquent, le manga possède également une partie “policière” qui, si elle ne révolutionnera pas le genre, reste suffisamment intéressante pour ne pas lasser le lecteur, et apporte un cadre concret (et crédible) à la construction de leur relation. Là où beaucoup trop d’auteurs se contentent d’inventer des prétextes “hénaurmes” pour mettre les deux protagonistes dans le même lit en un nombre record de pages, Sanami Matoh développe une histoire tendre et juste, agréablement servie par un humour typiquement japonais (qui n’exclut pas la présence de scènes plus dures et poignantes).

Contrairement à son “rival” qui lui ressemble beaucoup, “New York New York”, FAKE ne traite à aucun moment de la place de l’homosexualité dans la société. Il n’est jamais question de revendications ou d’appel à la tolérance (par exemple, l’homophobie n’est à aucun moment abordée). Et à vrai dire, c’est tant mieux. Le récit perd peut être un peu en crédibilité, mais un discours “engagé” n’aurait sûrement eu comme effet que de l’alourdir.

Quant à l’aspect graphique, il a le mérite de se démarquer fortement de la production habituelle (surtout au niveau des visages). Si le style peut paraître légèrement vieillot et désuet dans les premiers chapitres, l’auteur l’affine rapidement et offre par la suite un graphisme très convaincant, véhiculant beaucoup d’émotions.

Un petit mot sur l’OAV

En 1997, FAKE a connu une adaptation en OAV. Celle-ci n’est composée que d’un seul épisode, qui reprend le passage des vacances de Dee et Ryo en Angleterre, dans le deuxième tome. Sortie de son contexte, cette histoire n’aura donc de l’intérêt que pour les lecteurs du manga. Graphiquement assez médiocre (le style de l’auteur n’est pas vraiment respecté), cette OAV brille surtout par son humour assez efficace (directement repris du manga). La narration prend quelques libertés par rapport au support papier, mais l’esprit global est conservé. Si vous êtes fan, je vous conseille d’y jeter un coup d’oeil, ne serait-ce que par simple curiosité (cet OAV a été licencié aux USA).

Pour conclure ?

Certes, FAKE ne plaira pas à tous. Si vous n’êtes pas un tant soit peu sensible aux comédies sentimentales (qui plus est lorsqu’il s’agit de yaoi), vous risquez fort de vous ennuyer, l’aspect “policier” ne justifiant en rien la lecture du manga. En revanche, il constitue un excellent moyen d’appréhender ce genre encore peu répandu en France. La grande tendresse qui se dégage de la relation pure et maladroite qu’entretiennent les deux héros a de grandes chances de vous charmer. Sept volumes, cela peut paraître court, mais l’histoire n’aurait certainement pas réussi à passionner le lecteur pendant un plus grand nombre de tomes. La fin (qui n’est en fait qu’un début – vous comprendrez en lisant) peut se révéler quelque peu frustrante, sans que cela gâche particulièrement l’impression d’ensemble.
Que vous aimiez le yaoi, les comédies sentimentales, ou que vous souhaitiez simplement vous initier au genre, FAKE vous plaira certainement… Je vous conseille fortement de le lire, en tout cas. ^^

Les héros en fort bonne posture.

Ecrit par Rad le 15 mai 2005 | Modifié le 04 novembre 2007

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