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  • Titre original :
  • Gensô Suikoden
  • Titre français :
  • Gensô Suikoden

Jaquette PAL Gensô suikoden.

En 1995 était édité au Japon un petit jeu de rôle sans prétention du nom de Gensô Suikoden, l’un des premiers sur l’alors toute jeune PlayStation de Sony. Techniquement dépassé à l’heure où les envahissants polygones avaient déjà remplacé les modestes sprites, le jeu de Konami n’en fut pas moins encensé pour ses grandes qualités, en particulier sa fraîcheur et son originalité. Si bien qu’aujourd’hui la série des Suikoden grossit encore, et reste l’une des plus populaires dans l’univers du RPG console. Gros plan sur la genèse d’une saga épique.

~ The ground quakes with the anger of the people. Their cries echo in the heavens. Now is the time for this to end. – Warren ~

Carte de l'empire de la Lune Ecarlate.
L’Empire de la Lune Ecarlate est entouré de barrières naturelles (montagnes et océans) et s’étend autour du lac Toran, formé par les régions d’Alrus, Gouran, Great Forest, Kunan, Lorimar, Dana et Senan. Humains, elfes, kobolds et nains cohabitent sur ces terres. Au nord-ouest de l’Empire se trouvent les dangereuses cités-états de Jowston, au sud est localisée la chaude région de Kanakan. Et au nord-est du lac Toran se situe la capitale, Gregminster (ça va, vous suivez ? ). C’est dans cette cité impériale que vit et a toujours vécu Teel, jeune et insouciant fils de Teo McDohl, l’un des six grands généraux de l’Empire. Il est désormais temps pour le fils prodigue d’accomplir ses premières missions, de découvrir le monde qui l’entoure ; un monde pas aussi radieux qu’il l’aurait imaginé puisque le peuple est assouvi par le tyrannique empereur Barbarossa et sa puissante armée.

Outré par la violence et la corruption dont il sera témoin, Teel s’enfuira de Gregminster accompagné de ses fidèles serviteurs Cleo, Gremio et Pahn, et de son ami Ted, porteur d’une mystérieuse Rune (les Runes sont des artefacts magiques ayant une place importante dans l’univers de Suikoden). Bientôt, Teel se joindra à l’Armée de la Libération menée par Odessa Silverberg. Bientôt, il devra combattre l’Empire, et par là même son propre père. Il est temps de partir rassembler les 108 Etoiles du Destin…

Librement inspiré d’une légende chinoise (Shui Hu Zhuan – Au bord de l’eau), Suikoden est l’histoire d’une guerre civile menée par un peuple en révolte contre une autorité tyrannique. Une histoire parfois drôle mais souvent triste, un scénario riche et passionnant où se mêlent complots, trahisons, amour et haine.

~ I want to follow my heart. Whether it is right or wrong will be judged by history. – Pahn ~

Leknaat.
L’une des particularités de Suikoden est son très grand nombre de personnages jouables. En effet, le jeu ne comprend pas moins de 108 protagonistes (et même un peu plus) à recruter ! Tous possèdent leur propre background et auront leur rôle à jouer, bien que les principaux acteurs se limitent à une bonne trentaine de personnalités. En plus du très muet Teel (effet censé favoriser l’identification du joueur) et des personnages déjà évoqués plus haut, citons (parmi tant d’autres) Viktor et Flik, mercenaires qui joueront un rôle très important durant le jeu ; Mathiu, frère d’Odessa et stratège de l’Empire qui se ralliera à votre cause ; Leknaat, magicienne et annonciatrice du rassemblement des 108 Etoiles ; Windy, soeur de Leknaat ralliée à l’Empereur Barbarossa ; Teo McDohl, et les cinq grands autres généraux de l’Empire ; Joshua, souverain du royaume indépendant des Chevaliers Dragons, etc.

Mais un tel nombre de personnes, ça se loge ; il deviendra donc indispensable après quelques heures de jeu de trouver un quartier général. C’est ainsi que vous serez amené à explorer et vous approprier le château de Toran, situé sur l’eau près de la rive est du lac. Et à partir de cet instant précis, l’aventure prendra une toute autre dimension ! Après avoir donné le nom de votre choix à votre quartier général (narcissisme oblige, j’ai dû l’affubler de mon prénom ), un banquet sera organisé pour fêter l’heureux événement. Le château commencera ensuite petit à petit à s’organiser : chambre personnelle, entrepôt, salle de stratégie,... La forteresse évoluera progressivement en fonction de votre avancée dans le jeu, mais aussi du nombre de personnages recrutés. Car chaque personnage apporte son grain de sel au château : Hugo s’occupera de la bibliothèque tandis que Sergei mettra en place un élévateur, Chapman ouvrira une armurerie alors que Luc gérera la tablette des Etoiles, etc.

Tracez la carte du monde. Un salon de thé très... décoré.

Bref, le château est évolutif et c’est un véritable plaisir que de constater en allant y faire un saut entre deux explorations de donjon qu’un nouvel étage a été aménagé (le château final en comporte quatre plus un toit, un sous-sol et diverses annexes) ou que de nouveaux tapis bordent la chambre personnelle du héros. Il est donc indispensable d’enrôler de nombreux alliés un peu partout dans l’Empire afin de disposer d’un château complet, et cela ne sera pas toujours une tâche facile car là où certains vous rejoignent automatiquement au fil du scénario, d’autres imposeront une condition à leur recrutement. Fu Su Lu ne vous rejoindra que contre la modique somme de 10.000 bits, Mace n’acceptera votre offre que si vous lui parlez en étant accompagné de ses quatre disciples, Pesmerga (déjà bien caché) ne vous suivra que si vous avez recruté plus de 95 personnages, etc. A noter que terminer le jeu avec les 108 Etoiles du Destin vivantes (voir paragraphe sur les batailles) permet d’accéder à une fin plus complète, mais la tâche sera ardue.

~ Yet I became a military strategist, and took many lives. Master Liukan… did I do the right thing ? – Mathiu ~

Un petit combat.
Dans le monde de Suikoden, les conflits sont omniprésents et vous en serez très souvent le principal acteur. Trois types de batailles existent en tout et pour tout.

Premièrement : les combats classiques, ceux que vous verrez le plus souvent. Ceux-ci se déroulent au tour par tour et vous permettent de combattre avec six personnages de votre choix, disposés sur deux rangées selon leur type (Short, Medium, Long, sachant qu’un personnage de type Short ne pourra attaquer s’il est placé en retrait, et inversement pour le type Long). Différentes actions sont proposées durant ces batailles. “Fight” vous permet d’attaquer, défendre, utiliser une Rune magique (en ayant pris soin d’en équiper une au préalable), utiliser un objet ou effectuer une attaque groupée (“Unite”). Ces attaques spéciales reprennent le concept lancé par Chrono Trigger [1][3] en l’améliorant, puisqu’il est possible de frapper à 2, 3, 4 ou 5 en même temps selon les affinités entre les personnages composant votre équipe. A noter qu’il est également possible d’effectuer des combinaisons de magies une fois votre niveau assez élevé. La seconde action est “Run” et vous permet d’effectuer une tentative d’évasion, la troisième est “Bribe” (tentative de corruption par l’argent). La quatrième et dernière action possible est “Free will”, ce qui équivaut à un “Attack” général où chacun frappe à sa guise. Une fois les actions validées, votre équipe et les adversaires les effectueront simultanément durant la phase d’assaut, plus ou moins tôt selon leur vitesse. A la fin de la bataille sont distribuées les récompenses : points d’expérience (le jeu est assez généreux à ce niveau, un personnage à la traîne peut vite rattraper les fidèles), argent et objets.

Les batailles [excellentes !].
Deuxièmement : les batailles à grande échelle, qui opposent votre armée à celle de l’Empire. Dans celles-ci, la plupart des personnages que vous aurez recrutés (même les non-combattants) se verront attribuer un rôle, et seront disposés par groupes de trois. Mais attention, il ne sera possible de recourir à l’action proposée par un groupe qu’une seule fois durant la bataille. Les actions en question se regroupent en différentes catégories : Charge, Attaque à distance (archers, assaut de dragons, etc.), Magie et Autres, cette dernière catégorie englobant des actions comme Espionnage (afin de connaître l’action qu’effectuera l’adversaire au prochain tour) ou Corruption (afin de rallier des soldats adverses à votre armée). Chaque action est contrée par une autre (une volée de flèches contre aisément une magie, tandis qu’une charge face à la même magie serait du pur suicide), c’est pourquoi il est nécessaire d’anticiper. Une fois l’action validée, les petits personnages se mettent à courir vers l’ennemi, décocher leurs flèches, invoquer… A la fin de l’assaut, les pertes ennemies et alliées sont indiquées en haut de l’écran. La situation devient plus corsée lorsque l’on sait qu’une action ne réussit pas à tous les coups, et que si l’échec est réellement catastrophique, le leader du bataillon mourra… définitivement ! Et oui, il est possible de perdre des personnages en pleine bataille ; ceux-ci apparaîtront alors en gris sur la tablette des Etoiles. Mais rassurez-vous, ce genre de perte est assez rare (et au besoin un bon reset devrait arranger la chose). La confrontation s’achève lorsque les effectifs de l’un des camps atteignent le néant, ou lorsqu’un événement scénaristique vient interrompre les hostilités. Certaines batailles sont ainsi impossibles à gagner, comme celle à votre arrivée au château de Scarleticia face au général Milich.

Un duel.
Troisièmement : les duels, barres de vies à l’appui, opposant un personnage à un autre lors de certains moments-clés de l’histoire. Ces combats sont très rares et plutôt simples (en théorie mais pas toujours dans la pratique) puisqu’ils ne comportent que trois actions effectuables : Attaque, Défense, et Attaque désespérée. L’attaque perce la défense à coup sûr (plus ou moins selon le niveau des personnages) tandis que l’attaque désespérée est contrée par la défense et suivie d’une contre-attaque meurtrière, mais s’avère dévastatrice face à une attaque simple. Perdre un duel ne mettant pas en scène Teel permet de continuer le jeu mais le personnage en question mourra définitivement.

Il est bien sûr nécessaire afin de mener à bien ces batailles d’équiper vos personnages d’armures, de Runes (Crystaux à “attacher” sur un personnage via un maître des Runes) et d’objets toujours plus efficaces, ainsi que d’améliorer vos armes chez le forgeron le plus proche (le mieux étant de directement en recruter). A noter en ce qui concerne les Runes que celles-ci sont de plusieurs types : certaines vous permettent d’utiliser des sorts offensifs ou défensifs (Thunder Rune, Cyclone Rune,...), d’autres engendrent des coups spéciaux et s’avèrent généralement exclusives à certains personnages (Falcon Rune, Hate Rune,...) tandis que les moins classables permettent en vrac d’augmenter vos capacités (la Gale Rune multiplie la vitesse du porteur) ou de modifier certains paramètres (la Fortune Rune permet de doubler l’expérience récoltée après un combat). Il faudra judicieusement choisir quelle Rune attacher à quel personnage, car il ne pourra jamais en porter qu’une seule à la fois.

~ I may be a fool, but these things I get passionate about. – Gaspar ~

Suikoden, c’est aussi des tas de petits à-côtés qui font que l’on ne s’ennuie jamais. En plus de partir en quête de nouveaux compagnons ou d’objets rares, vous pourrez également rester dans votre château vous amuser au bonneteau avec Marco, aux dés avec Gaspar ou à un jeu de mémoire avec Georges. Toujours dans le château, une petite visite des bains de Sansuke (eux aussi évolutifs, vous ne disposerez en effet au début que de barils remplis d’eau) n’est jamais de refus ; l’occasion d’assister à d’amusantes petites séquences ou d’aménager les lieux avec les antiquités amassées durant vos aventures (vases, tableaux, statues,...). Comment ? Il vous manque une jarre ornée d’un dragon que vous recherchez absolument ? Pas de problème, un petit saut à la bibliothèque d’Hugo vous permettra de consulter le livre de référence des antiquités (pour autant que vous l’ayez récupéré). Et cetera…

Petit répit entre deux combats. Votre château.

~ Shall we call it a day ? – Kasios ~

Musicalement parlant, Miki Higashino a ici réalisé du très bon comme du “juste” bon. Certains thèmes tels que “Forgotten Days”, “The Advancing Army” ou “Avertuneiro Antes Lance Mao” sont en effet de véritables bijoux, tantôt mélancoliques et tantôt épiques ; le genre de compositions qui marquent et prennent réellement aux tripes. D’autres se laissent écouter sans toutefois nous donner l’envie de crier au génie. Globalement, cette bande son aux sonorités à tendance orientale et celtique est donc bien au-dessus de la moyenne, et porteuse de plusieurs mélodies cultes que l’on retrouvera dans les épisodes suivants. A noter qu’il est possible d’écouter une partie des musiques du jeu en allant parler à Kasios, située sur le pont vers la tour ouest du quartier général (après l’avoir recrutée, bien sûr).

~ The light in my eyes may have faded, but the light in my soul continues to shine. – Morgan ~

Graphiquement, Suikoden est assez inégal. Là où les phases d’exploration classiques restent assez jolies (bien que manquant parfois de couleurs), mêlant décors d’influences européennes et orientales, les combats ont quant à eux bien moins survécu à leur décennie. Et en particulier les duels qui sont une plaie pour les sens visuels. Je me demande quel est le moins laid entre la bouillie de pixels que constitue un personnage en gros plan ou la pseudo-3D rotative déformant les décors. Au moins, cet effet rend les batailles dynamiques. Et puis, il y a pire… Le character-design de Junko Kawano est par contre sympathique et donne un certain charisme aux différents personnages.

Promenons nous dans les bois... Camelot ! Ha non, votre château.

~ If my hopes remain alive… I can be proud of my life. – Odessa ~

Suikoden fut mon premier vrai RPG, et il me tient aujourd’hui encore particulièrement à coeur. Même s’il pêche par ses graphismes dépassés ainsi que sa faible durée de vie (tiens, je n’en ai pas parlé plus haut), il reste un excellent jeu, travaillé, intense, comportant des idées de génie et ayant donné naissance à une suite encore plus merveilleuse. Plus généralement, Suikoden est devenu au fil des épisodes un univers riche et complexe dont chaque nouveau volet m’enchante encore un peu plus. Merci, Konami !

Ecrit par Aniki le 02 février 2005 | Modifié le 04 février 2008

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