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  • Kemonozume
  • Titre français :
  • Kemonozume

Le couple principal de Kemonozume.

Eté 2004, pays du sushi levant.
Le très respectable Studio 4°C sort un OVNI de ses cartons, Mind Game, avec un gars un peu foufou à la réalisation. Le monsieur signait là sa première oeuvre personnelle (d’envergure) après avoir occupé divers postes sur de nombreux projets tels que Crayon Shin-Chan, Mes Voisins les Yamada, ou encore Nekojiru-sou (co-réalisateur pour ce dernier). Retenez bien ce nom : Masaaki Yuasa. Oui, car par la suite j’en parlerai comme étant “le réalisateur”. Ceci est un article INTERACTIF, j’exerce votre mémoire (le Dr.Kawashima n’a qu’à bien se tenir). Quelle classe.

Un samurai des temps modernes. Ce verre ne me smeble pas très catholique.

Bref! Remarqué pour son inventivité (mélanges de photos retouchées et de dessin libre, notamment), son rythme, son humour, sa réalisation de folie et son ambiance barrée, Mind Game a plutôt marqué l’esprit des amateurs éclairés. Ou les esprits des amateurs éclairés ou les esprits des amateurs mal éclairés ou mon esprit de moi, ça marche aussi. Bref c’était un film formidablement mature entre poésie et nonsense total, complètement décalé par rapport au reste de la production. C’est pourquoi le réalisateur (qui, déjà?) s’est dit “Yeah, on remet ça!”. Enfin à peu près. Donc on reprend pas tout à fait les mêmes mais on recommence, cette fois pour une série de 13 épisodes produits par Madhouse (qui a l’habitude de produire du lourd, très lourd).

Un groupe de shôkujin.
Kemonozume, c’est un peu Roméo et Juliette avec des sabres, des streums, des persos “mal dessinés” et des mecs en costume animalier. Louche, n’est-il pas? Ceci dit le pitch est assez basique : il existe une espèce très planquée de créatures appelées “shôkujin” qui sont chiantes et lourdes parce qu’elles (et ils, bref on se comprend) ont tendance à ingurgiter les humains. Leur provenance est expliquée dès les premières secondes, pas de panique. D’apparence humaine, les shôkujin se transforment lorsqu’ils/elles sont soumis(es) à de forts stimulis. Mais à ce rythme là y’aurait plus d’humains donc il faut donc un contrepoids, le kifuuken, organisation d’élite chargée d’éliminer ces monstres. Toshihiko est le fils du maître de ce bushido-clan super secret adepte de la “katanaïsation intrinsèque” de monstres à griffes. Parfois ils utilisent des “mobile suits”, aussi, parce que bon l’univers est moderne et légèrement futuriste. Tout allait donc pour le presque mieux dans le pas-si-meilleur des mondes. Ceci dit c’était sans compter sur la fin de l’épisode 1, voyant Toshihiko tomber amoureux d’une jolie blonde rencontrée par hasard en bord de mer (après avoir poursuivi un singe super balèze à la baston… si, si). Yuuka est sexy, distinguée, gentille, tout ça… Sauf que pas de bol pour lui, Yuuka est une shôkujin. Et malgré leur rapide idylle consentante, les activités sexuelles vont être bien difficiles. Oui du sesque! Car Kemonozume est une série très adulte dans laquelle on voit des SEINS et du SANG, de toutes les couleurs d’ailleurs. Bien sûr on peut difficilement aller jusqu’à montrer des PENIS donc d’habiles astuces graphiques sont utilisées.

Ascenseurs version XXXIème siècle.

Tout ça pour dire que Toshihiko et Yuuka décident de s’enfuir, ensemble, loin de leurs proches respectifs. Ce qui ne va logiquement pas plaire à ces derniers… Et s’ensuit une “road series”, qui, évidemment va mal tourner mais je vous laisse découvrir le comment du pourquoi qui et où.

Cendrillon ?
Allons droit au but : environ 80% de l’intérêt de Kemonozume repose sur son atmosphère visuelle. L’histoire, bien que n’apportant rien de nouveau, est certes intéressante à suivre tandis que les personnages sont fortement charismatiques (en particulier le bad guy, un gros porc complètement givré). Bien sûr, 20% ça peut paraître léger pour “tout le reste”, mais disons que les qualités esthétiques de la série sont telles qu’elles s’imposent tout naturellement, à la manière d’un Sultan dans une baignoire. Evidemment, on n’atteint pas le niveau technique de Mind Game. Logique. Mais étonnamment on s’en rapproche presque! Certaines scènes sont extrêmements bien animées, tandis que la maîtrise esthétique se ressent sur la plupart des plans. Ils aiment les diagonales dynamiques et la démesure, ces petits filous. Bref on se surprend parfois à dire “ah oui quand même!”. De plus un soin assez remarquable a été apporté aux couleurs (plein de cheveux verts), à l’équilibre des plans, à la variation des textures ou autres aquarelles, etc. C’est à la fois kitsch, fragile, trash, un peu expressioniste, un peu pop, et très Japonais aussi. Dès le premier épisode, les règles sont établies : Kemonozume sera une série sans concessions aux multiples expérimentations visuelles, quitte à dérouter ou rendre le public dubitatif quant à la cohérence graphique.

Singin' in the Rain. Ce mec à mauvaise mine.

Pour tout dire, et au même titre que dans Mind Game l’univers développé ici se rapproche fort des planches d’un Taiyou Matsumoto (Amer Béton, GoGo Monster, etc.). Du caricatural, de l’absurde, des symboles. De la poésie, aussi. Le second épisode contient à ce titre une scène remarquable où les deux amants, sur le toit d’un immeuble, se laissent aller la tête en arrière pendus par les pieds. Et s’embrassent fougueusement à plusieurs dizaines de mètres de hauteur. Juste avant, Yuuka disait à Toshihiko : “je serais heureuse que ce soit toi qui me tue”.

Un baiser dangereux. Heu... okay [il a des oreilles de Mickey].

Bref le réalisateur (son nom?) a su s’y prendre pour diriger son équipe avec talent. Un certain nombre de réalisateurs invités ont également pu apporter leur pierre à l’édifice, tel qu’Osamu Kobayashi (Paradise Kiss, Kimagure Orange Road…). Notons par ailleurs que quasiment chaque avant-générique contient un (très) court-métrage montrant l’impact des shôkujin dans la société, l’occasion d’expérimenter et d’explorer encore plus d’univers graphiques. Je trouve le #8 et son traitement ”écorché” assez excellent, par exemple. Tiens, puisque j’évoquais le générique, celui-ci donne très bien le ton avec son avalanche de couleurs criardes, son découpage psychédélico-bestial, sa musique jazzy et son traitement vintage. En règle générale, les musiques s’apparentent d’ailleurs au jazzy/bluesy. De quoi accompagner le visuel avec classe tout en conservant une certaine discrétion.

Hum. Oui, oui, la guerre.

Inclassable donc, ce Kemonozume ? Disons que c’est une romance cruelle et horrifique sur fond de SF et de psychédélisme. “Entre tradition et modernité” (air japonais connu). Comment, plus de louanges? OK : c’est pointu, drôle, original, poétique, bourré d’action. En fait j’ai du mal à y trouver des défauts si ce n’est certains passages à vide, une fin qui arrive un peu vite ainsi qu’une réalisation parfois en baisse. Malgré tout le respect que méritent les concepteurs pour leurs prises de risque, il faut en effet savoir différencier animation expérimentale et animation cheap en 3 étapes/seconde (Mind Game n’avait pas ce problème, il s’agit donc bien d’une contrainte due au format TV).

Conclusion : Kemonozume est, au même titre qu’un Melancholy of Haruhi Suzumiya (fanboy spotted), une série à forte personnalité et sans doute l’un des incontournables de 2006. Evidemment son côté très extrême et marginal fera que certaines personnes seront dégoûtées par, au choix, le côté difficile d’accès ou la violence graphique, mais il serait judicieux de tenter l’expérience, juste au cas où...

Ah au fait, c’est quoi déjà le nom du réalisateur? ;)
Bon comme je sais que vous avez retenu, voici un bonus :

Heum. Heum².

Ecrit par Aniki le 21 septembre 2008 | Modifié le 21 septembre 2008

Le 22/09/2008 à 00:26:05

Pusaikozu
Avatar de Pusaikozu
Inscrit le : 31/12/2006
Commentaires : 231

Je me souviens que j’avais eu du mal à me lancer dans la série. J’ai du m’y prendre à deux fois, une pour me dire “oh putain que c’est moche” et j’ai laché le tout illico… puis la deuxieme en passant outre le côté vilain pour chercher un peu le reste (et c’est comme un FF7 je dirais, au début on ne voit que la laideur du truc et après on oserait même dire qu’en fait c’est juste superbement beau :p ).

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